J’ignore quelle sera l’issue du vote auquel nous a précipitamment appelé le Président de la République. Notre constitution lui en donnait le droit, je n’ai rien à redire là-dessus. Je ne prendrai pas non plus par la main nos adhérents ou nos sympathisants pour guider leur choix. Je n’ai pas ce mandat. Je redis en revanche à qui veut l’entendre que la CFTC a toujours été, est et restera un syndicat réformiste, humaniste, pro-européen et modéré.
Mes bientôt cinq années d’expérience à la tête de la CFTC, les situations dont j’ai été le témoin et/ou l’acteur m’autorisent en revanche à vous dire comment nous en sommes arrivés là. Comment notre pays n’a pas su ou pas voulu, ces dernières années, privilégier la voie du compromis. Quand à 14 reprises, toute la rue organisée par les syndicats a dit NON à la réforme des retraites, le gouvernement n’a pas daigné corriger sa copie. Quand les partenaires sociaux ont unanimement rejeté la énième réforme de l’Assurance chômage au motif qu’elle fragilise les plus précaires, ce même gouvernement n’a pas davantage composé avec eux. Dans une démocratie mature, les corps intermédiaires sont pourtant légitimes à coproduire les règles de gestion des régimes sociaux dont on leur confie le pilotage. Faute d’entendre les syndicats, c’est la rue qui prend le relais ! Pire, il s’est peu à peu insinué dans l’esprit de certains de nos compatriotes que la meilleure façon d’obtenir satisfaction, c’est de recourir à la violence. Quelques milliards opportunément concédés aux gilets jaunes et autres experts en agitation sont venus conforter cette triste thèse.
Dans ce contexte, les parlementaires de tous poils n’ont guère fait mieux. Alors qu’à maintes reprises, ils avaient l’opportunité de construire des majorités sur des textes dont on pouvait trouver l’inspiration dans leurs propres programmes, ils ont trop souvent tourné le dos à l’intérêt général pour lui préférer des parties de billard à douze bandes. Dans le secret de l’isoloir, il ne reste plus aux électeurs qu’à exprimer leur consternation et leur rancœur !
Le 7 juillet au soir, le prochain gouvernement aura pour première urgence de soigner notre démocratie, de la projeter dans l’âge adulte. Pour ce faire, les décideurs, quel que soit leur périmètre, devront apprendre à fabriquer autrement la décision. Experts de leur quotidien au travail, les salariés et leurs représentants syndicaux veulent peser davantage dans tout débat, dans tout texte de loi susceptible de changer leur vie au travail et parfois au-delà. Le temps est venu de s’appuyer sur cette expertise. A défaut, l’avenir ne peut que s’assombrir. La CFTC, elle, restera fidèle à ses valeurs et à ses principes !