Source : Les Echos – Par Stephane Frachet Publié le 10 oct. 2024 à 07:02Mis à jour le 10 oct. 2024 à 11:16
Les manifestations d’hostilité se multiplient à quelques semaines d’une nouvelle étape pour la zone à faibles émissions (ZFE) de Lyon, d’autant qu’une consultation publique s’achève pour une zone à trafic limité dans sa presqu’île.
Fumigènes et cornes de brumes ont perturbé le dernier conseil métropolitain de Lyon fin septembre. Le Collectif des défenseurs de Lyon et du Grand Lyon accuse la majorité écologiste, présidée par Bruno Bernard, d’agir de manière « brutale et verticale » dans l’application de ses projets liés aux mobilités.
Pour les 150 manifestants ce jour-là (600 selon les organisateurs), dont Jérôme Moroge, maire (LR) d’Oullins Pierre-Bénite, où une voie cyclable en site propre modifie le plan de circulation,
l’exécutif métropolitain est « anti-automobiliste, se préoccupant seulement du vélo », sans prendre réellement en compte l’avis des habitants.
« Oui aux vélos et au partage de la route, mais pour tous les modes de transports. Nos revendications doivent être écoutées », revendique Jean-Noël Potin, porte-parole du mouvement, qui estime que la stratégie « tout vélo » de la métropole de Lyon fragilise les commerces de proximité avec des baisses allant jusqu’à 30 à 40 % des chiffres d’affaires.
50.000 signatures pour dire « Stop à la fermeture »
Cette contestation bruyante rejoint celle des commerçants de la presqu’île de Lyon, relayée par la CCI de Lyon Saint-Etienne Roanne. Concernant le déploiement du réseau cyclable, ou voies lyonnaises , la chambre de commerce et d’industrie a identifié des points noirs qui ont un effet direct sur la vie économique : rue de Bonnel au niveau des Halles Paul-Bocuse, route de Vienne vers le sud, avenue Rockefeller et cours Albert-Thomas dans les 3e et 8e arrondissements de Lyon, ou encore dans le centre-ville d’Oullins-Pierre-Bénite.
« Nos préoccupations sont liées à la difficulté de poursuivre les livraisons, à la sécurisation des cyclistes et des livreurs, aux reports de circulation qui ne semblent pas avoir été étudiés », estime Philippe Valentin, président de la CCI Lyon Saint-Etienne Roanne, qui demande à la métropole de prolonger les consultations en cours, notamment celle sur la zone à trafic limité (ZTL) de la presqu’île de Lyon qui s’achève le 11 octobre.
Corollaire de la zone à faibles émissions (ZFE) qui couvre l’agglomération, la ZTL impliquera une piétonnisation accrue du centre-ville. La fermeture ponctuelle de la rue Grenette, qui coupe le coeur commerçant de Lyon de part en part, a suscité une levée de boucliers. Une association des habitants de Lyon et du Grand Lyon, qui se dit apolitique, a lancé une pétition « Stop à la fermeture ». Le 10 octobre, elle rassemblait 50.000 signatures, ce qui est considérable.
Du côté de la métropole, le président Bruno Bernard estime que les concertations ont été menées à bien et que les oppositions ont pu s’exprimer. Dans la balance, il y a la qualité de l’air dégradée par les gaz d’échappement que respirent les Lyonnais. Or, à l’inverse d’autres grandes villes, celle de Lyon ne s’améliore pas vraiment, a rappelé récemment l’organisme Atmo Auvergne-Rhône-Alpes.
Hémorragie dans les commerces
Cette montée de tension intervient alors que le commerce lyonnais souffre. Près de 800 emplois ont été perdus au premier trimestre 2024, selon le dernier relevé de l’Urssaf. Ce n’est pas seulement dû aux restrictions de circulation, puisque presque tous les territoires périphériques connaissent un recul semblable, notamment la très commerçante intercommunalité de l’Est lyonnais (-98 emplois).
Ce contexte contribue à envenimer la situation. C’est d’ailleurs ce qui ressort d’une étude BNP Paribas Cetelem. « En couvrant 700.000 habitants, la ZFE de Lyon est plus ambitieuse que celle de Marseille. Elle a aussi la particularité d’être la seule en France à prévoir une exclusion des véhicules thermiques la nuit. Alors que les transporteurs et les commerçants ont obtenu une exemption pour assurer les livraisons à Paris », compare Christophe Michaëli, directeur mobilités de BNP Personal Finance.
Le service des études de la banque a relevé que 16.000 véhicules utilitaires Crit’Air 3 (sur 105.000 au total) sont normalement exclus de la ZFE le 1er janvier prochain. Or ils sont toujours immatriculés.